X.
Une foule. Compacte mais mouvante. Des langues. Tant, que le latin s'en perd. Des couleurs. Beaucoup. Le regard n'accroche plus à rien. Ni aux matières. Ni aux mots. Ni aux éclats. Les femmes se ruent. Les hommes se traînent. Pris dans la marée et le devoir de suivre. Ils avancent. Pourchassent leurs biens-aimés. Les minettes dispersent leurs maigres salaires ou l'argent paternel aux quatre coins des caisses du chic. Le dernier cri. Dernier sortie. Les effusions de joie. L'objet tant convoité. Parfois si durement offert. Enfin. Plaisirs de fin de semaine bien mérité. Les sourires se lisent deci delà. Partout. Du monde. Et le temps s'enfuit. La course prend un rythme toujours plus rapide. Effréné. Le temps n'attend pas. Les Hommes ne s'arrêtent pas. Les couleurs et les odeurs. En une valse nauséeuse se mélangent. Les dames s'enlisent dans les portiques du métro. Trop de sacs siglés. Le mécanisme s'enraye. Les bras trop chargés. Elle restent bloquées entre deux moulins. A la surface, d'autres courent encore. D'un comptoir à l'autre. Et face aux plus grandes entrées des magasins des Grands Boulevards parisiens, d'autres s'installent. Etablissent leurs campements. Ne demandent rien. Ne parlent pas. Mais disent pourtant. Sacs plastiques percés. Anorak élimés. Chariots de supermarché et bidon recyclé pour quelques châtaignes chaudes dans le vent d'octobre. 2 euros le cornet. Les doigts noirs d'un chardon artificiel. Dans l'attente. Ou sur une chaise. Le regard dans le vide du bitume. Bercés par le va et vient incessants, s'endorment contre une barrière de sécurité. Ceux qui n'ont rien regardent ceux qui ont. Qui ont ce qu'ils peuvent. Ou ce qu'ils veulent. Ou trop, parfois. Les contrastes des grandes villes. Où les plus riches croisent les plus pauvres sur le même trottoir. La capitale. Le lieu des excès. Paris.
IX.
Ils sont toujours. A toutes les stations. Dans toutes les
rames. Ils se remarquent très vite. Et certains se manifestent largement. C'est
toujours un peu la même rengaine. Elle lui tient la main. Ou agrippe son jean
au niveau de son genou. Lui, parfois, passe son bras derrière sa nuque. Elle le
tire vers elle. Elle enroule des baisers bruyants autour de son cou comme les
perles d'un collier. Parfois, elle attrape sa main. Et s'esclaffe. Marque son
territoire. Le lien. Elle pose ses doigts sur sa joue. L'incite à pivoter. Et
le force à planter ses yeux dans les siens. Il se détourne quelques fois. Ou
regarde par la vitre rayée quand elle a posé sa tête sur son épaule.
Mais eux, détonnent. Un peu. Il ne cesse de la tirer vers lui. Sa main enserre
sans relâche sa hanche. Et il enfouit sa tête dans son cou. Elle. Elle ne
semble pas aussi enclin que lui à la démonstration. Et à chacune de ses approches,
elle renverse sa tête. Gênée ou lassée ou indifférente. Ou ... Il ne donne que
très peu d'air à leurs corps. Et chacun de ses pas de côtés l'invitent à la
rejoindre. Il l'a fait virveloter. Elle se prête au jeu de ce rock n' roll
improvisé dans l'espace réduit de la rame. Elle ne rit pas. Se laisse faire,
pantin. Elle ne proteste pas non plus. et il revient à la charge. Se contente
seul. D'un baiser sans retour. Sans regard. Sans caresse. Inversion des
clichés.